jeudi, mars 28, 2024

L’agriculture biologique peut nourrir la planète !

Selon Marc Dufumier on pourra nourrir les 9 milliards d’êtres humains en 2050 avec l’agriculture biologique.

Il a répondu à nos questions à l’occasion de sa venue à la 8ème édition du salon Planète en fête qui s’est déroulée à Saint Hilaire du Maine les 2 et 3 juillet dernier.



Pourquoi êtes vous convaincu à ce point que la bio peut nourrir la planète ?


D’abord parce qu’on produit déjà plus que ce qui est nécessaire pour nourrir ses habitants (pour nourrir correctement une personne il faut environ 200 kilos de céréales par an et par habitant et nous en produisons 330 kilos). Il y a donc aujourd’hui surproduction par rapport à ce qui serait nécessaire pour nourrir correctement le monde.



Alors pourquoi la faim tue encore en 2011 ?


Ce n’est pas un problème de manque de nourriture, c’est un problème de pouvoir d’achat et de redistribution des revenus.

C’est le cas ici en France, ce n’est pas parce que la France ne produit pas assez que des personnes fréquentent les restaurants du cœur, la banque alimentaire, le secours populaire, etc… c’est parce qu’ils sont trop pauvres pour pouvoir acheter la nourriture.

Et c’est aussi le cas des pauvres de la planète qui souffrent de la faim, qui sont pour l’essentiel des paysans du sud. Il faut que l’on cesse de vouloir leur exporter à tout prix nos surplus. Ils pourront produire plus chez-eux et avoir ainsi de l’argent pour se nourrir et surtout pour s’équiper afin de produire par eux-mêmes de quoi manger.

Vous pensez que le simple fait de stopper les exportations du nord vers le sud réglerait le problème de la faim dans le monde ?

Ici il nous faut produire moins mais mieux (généraliser l’agriculture biologique) et là-bas il faut utiliser les techniques inspirées de l’agroécologie, proches du cahier des charges bio. On permettrait effectivement à ces populations de produire d’avantage et de dégager plus de revenus. Et c’est possible, en faisant un meilleur usage des énergies renouvelables (rayons du soleil , carbone de l’air, azote de l’air…).

Vous parlez du végétal mais qu’en sera-t-il au niveau de la production animale…?

C’est vrai qu’il y a un marché croissant de la viande, des pays comme la Chine ou le Vietnam commencent à en consommer, donc il y aura une demande croissante en production végétale pour nourrir les animaux, mais mon inquiétude est plus liée aux agrocarburants.

Il faut savoir qu’il y a des marchés solvables pour acheter nos excédents de production (la différence entre les 200 kilos de céréale nécessaires et les 330 produits), une partie va vers l’alimentation animale au lieu d’aller directement vers l’alimentation humaine, mais une partie croissante sert aujourd’hui à produire de l’éthanol ou de l’agrodiésel pour abreuver nos voitures.

Et que pense la FAO (l’organisme international chargé de lutter contre la faim dans le monde) des positions que vous défendez ?

Des publications de la FAO ont dit que l’agriculture bio et une agriculture inspirée de l’agroécologie, intensément écologique, c’est à dire faisant un usage intensif des rayons du soleil, un usage intensif du gaz carbonique de l’air, un usage intensif de l’azote de l’air, permettrait de nourrir les 9 milliards d’habitants de la planète en 2050.

Cette idée fait-elle aussi son chemin chez les responsables agricoles notamment ?

Les idées progressent, la pratique plus lentement.

Les personnes qui disaient il y a encore quelques années que le bio c’est le retour à la lampe à huile, ne disent plus aujourd’hui que c’est une agriculture archaïque mais qu’au contraire cette agriculture intensément écologique est trop sophistiquée. Effectivement, l’agriculture bio nécessite des rotations complexes, des assolements diversifiés, des techniques de neutralisation des insectes par des voies biologiques… oui, l’agriculture bio est savante !

Et après 2013, on aura une nouvelle PAC en Europe (Politique Agricole Commune), prenons-nous l’orientation du développement de l’agriculture biologique ?

Le vrai problème il est effectivement politique et malgré les bonnes intensions de Dacian Colios, le Commissaire européen, je n’imagine malheureusement pas une décision de révision complète de la PAC qui favoriserait la production bio chez nous, limiterait notre production d’excédents tout en autorisant à l’OMC les pays du sud à mettre en place des droits de douanes à leurs frontières pour offrir des débouchés à leurs productions locales.

Pourtant, l’impact serait aussi positif au niveau de l’emploi ici, puisque l’agriculture biologique est plus artisanale, elle exige plus de soins, donc plus de travail. C’est pour cela qu’elle doit être bien rémunérée tout en devenant accessible à tous les consommateurs par la réduction des circuits de distribution.

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