mardi, mars 19, 2024

La Clé aux âmes de Gilles Laporte (Presses de la Cité)

« Littérature sans Frontières » est une chronique de Pierre Guelff.

Derrière tout ouvrage, il y a, bien entendu, un auteur, mais parfois, il y a aussi une « âme », celle qui transcende un récit. Dans « La Clé aux âmes » de Gilles Laporte (Presses de la Cité), si l’histoire est poignante et bouleversante, elle est également emplie de « messages » subtils qui en font alors un roman exceptionnel.

La saga se déroule dans les Vosges, s’étire sur trois décennies (1925 à 1954) et décrit le combat aussi noble, si j’ose dire, que farouche pour promouvoir et défendre les valeurs laïques et républicaines. Les principaux personnages vont du luthier franc-maçon à une institutrice, Mathilde, jeune veuve d’un mari ayant été l’une des nombreuses victimes de la Première Guerre mondiale, à P’tit Paul, leur fils, amoureux du violon de son père (d’où la « clé » et « l’âme »), devenu maître d’école à son tour, de Louise, sa bien-aimée, tondue à la Libération alors qu’elle avait accepté « la souillure pour sauver son homme » d’un deuxième envoi en camp de concentration, ayant pu s’échapper une première fois de l’enfer nazi, puis Victor, un être bouffé par l’ambition et un ardent fasciste que l’auteur décrit de la manière suivante : « Jusqu’à l’âge de quarante ans, on a le physique que la nature nous a fait. Après, on a la gueule qu’on mérite ! », et le lecteur n’aime pas du tout cette gueule-là, je vous l’assure.

Avec parcimonie, Gilles Laporte distille d’autres pensées qui marquent les esprits. Telle l’explication du luthier à P’tit Paul au sujet du Temple de Salomon, cher aux francs-maçons : « Il est toujours en construction, partout dans le monde. Chacun de nous doit faire sa part de travail qui permettra, peut-être, de l’achever un jour. Chacun de nous doit tailler sa pierre destinée à prendre sa place dans l’édifice commun. » Et, face aux atrocités de la Seconde Guerre mondiale, ce cri de rage : « Où sont-ils les chefs, ceux des états-majors, des palais de la République, les étoilés d’opérette qui ont produit un tel désastre ? »

Et, ces deux propos, le premier avant la guerre 40-45, le second en 1954 : « La bonne conscience complote souvent avec l’amnésie » et « Hier on mourait dans les rues sous les balles allemandes. Aujourd’hui, on meurt dans les rues… de faim et de froid ! »

Ah ! Comme il est heureux de constater que la littérature peut encore « produire » des auteurs qui touchent l’âme du lecteur…

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