vendredi, avril 19, 2024

Assises nationales des déchets, interview de Isabelle Martin, directrice de relations institutionnelles chez Suez recyclage et valorisation

Isabelle Martin, directrice de relations institutionnelles chez Suez recyclage et valorisation
Isabelle Martin

Les assises des déchets ont lieu les 2 et 3 octobre prochain à Nantes, l’occasion de faire un point sur la façon dont nous gérons nos déchets en France.

 J’ai interviewé Isabelle Martin, directrice de relations institutionnelles chez Suez recyclage et valorisation. A l’occasion des Assises Nationales des déchets qui se tiendront donc les 2 et 3 octobre prochain vous allez animer une conférence sur les outils numériques au service de la gestion des déchets. De quoi parle-t-on ? C’est quoi ces outils numériques ?

 

On est dans une société de plus en plus connectée, et pour les déchets et bien effectivement, les outils numériques vont nous aider… vont aider le citoyen à être de plus en plus connecté pour améliorer son geste de tri.

Mais au-delà de ça, ça va nous aider également en tant qu’industriels, à mettre en place des outils qui vont pouvoir être plus performant.

Par exemple sur la collecte des déchets on va pouvoir déployer des puces sur les bacs qui reçoivent les déchets de façon à mesurer les quantités de déchets à l’intérieur et optimiser les collectes et les tournées de collectes, ce qui va permettre de faire des gains et d’optimiser.

C’est aussi utiliser toutes les données qui sont maintenant de plus en plus disponible à travers l’intelligence artificielle pour robotiser et détecter sur les bandes transporteuses de nos centres de tri les différents types de plastiques d’emballage, de façon à limiter les erreurs de tri et à préparer une matière de qualité supérieure à celle qu’on a aujourd’hui par exemple.

 

 Donc on ne parle pas trop d’applications mobiles, mais c’est plus le déploiement de l’intelligence artificielle au service du tri ?

 

Il y a aussi bien évidemment tout ce qui concerne ce dont vous parlez, c’est-à-dire les applications services des bonnes pratiques. Ça, c’est déjà bien déployé. Si vous êtes un citoyen sur Paris par exemple, vous voulez savoir où il y a une déchetterie, vous pouvez effectivement vous connecter et vous aurez toutes les informations sur les horaires, les temps d’attente, les périodes d’influence, les déchets que vous pouvez déposer / pas déposer, si vous voulez faire enlever un encombrants, à quel moment… tout cela existe déjà.

Il y a ces robots donc qui qui permettent de faciliter le tri, est-ce que vous pouvez nous expliquer d’où on est partis et où on va arriver avec ces nouvelles technologies au service des déchets ? Au départ on ne triait pas, puis est arrivé le tri sélectif « manuel » puis on a mis de l’informatique dans tout ça…

 Vous avez entièrement raison oui. Au départ le premier flux qu’on a séparé c’est le verre. Ça date déjà de 25 ans, mais ce sont des boîtes « des box » qui sont sur les trottoirs et petit à petit effectivement, on a mis en place, soit de la collecte sélective qui se fait au sein du ménage. Pour les ordures ménagères il faut le trier pour séparer les différentes matières.

Il y a déjà plusieurs années (une vingtaine d’années, se sont développé les centres de tri. Dans les premiers centres de tri, on triait le carton du plastique et petit à petit, comme dans les plastiques il y a beaucoup de résines (il y a 5 résine majoritaire notamment le polyéthylène qui constitue pratiquement toutes les bouteilles) on les a amélioré avec des détecteur optiques… des soufflettes qui permettent aussi d’évacuer les déchets qui doivent pas rester dans le flux. Et derrière, on a toujours quand même du tri manuel pour corriger les erreurs qu’a fait la machine.

Donc, comme on va avoir un déploiement sur 3 ans en France de l’extension des consignes de tri,  nous allons mettre dans le bac jaune d’autre matières comme les barquettes en plastique, les pots de yaourt, les enveloppes de de jambon etcetera.. Et bien en fait on est amenés à utiliser l’intelligence artificielle qui va utiliser soit les photos, la détection de la forme qui est à trier et tout ça va nous permettre effectivement d’avoir un meilleur tri. Et il ne faut pas oublier qu’on doit préparer la matière pour pouvoir la vendre derrière. Et pour qu’elle puisse être recyclée, il faut amener cette matière un bon niveau de qualité, satisfaisante pour l’industriel.

Sur une chaîne de tri, on a l’aimantation, l’électricité statique, vous avez parlé des soufflettes, la visée optique…

Vous en avez cité une grande majorité effectivement… donc il y a effectivement tout ce qui est soufflette pour séparer ce qui est léger du reste. On voit bien que les soufflette c’est plutôt pour écarter le plastique. Ensuite vous avez du tri optique. Donc là c’est de l’infrarouge qui vient détecter la typologie de la résine et qui va permettre une séparation en trois flux.

Il y a également une recherche au niveau national qui va être déployée pour pouvoir améliorer encore ce tri en utilisant la détection de la forme qui arrive sur la bande transporteuse.

Alors quand on passe d’une ville à l’autre on a vu que les déchets collectés ne sont pas les mêmes, donc on suppose que c’est au centre de tri que ça se passe ? C’est-à-dire qu’on est dans l’incapacité de trier c’est ça ? C’est pour cette raison que l’on refuse certaines matières dans les poubelles de recyclage ?

 Tout à fait… Effectivement sur le centre de tri on ne peut pas tout trier.  Dans certains arrivages avant de charger les déchets il faut déjà faire un tri pratiquement à la pelle parce qu’il y a des consignes qui ne sont pas bien connues. Donc on trouve un certain nombre de flux qui ne peuvent pas être recyclés.

Comment sont répartis les centres de tri ?

En fait, historiquement, il y a eu beaucoup de petits centres de tri qui se sont ouverts et qui posent aujourd’hui d’ailleurs la problématique de de leur revamping (réorganisation) parce que bon c’est centre de tri ne sont plus suffisants pour effectuer un tri correct des matières… Donc il y a il y a depuis 3,4 ans une optimisation des centre de tri qui sont en cours et l’idée c’est d’arriver à 200 centres de tri au niveau français. Ça se calcule en fait par « bassins de vie ».

 

Il y a 96 départements et donc 200 centres de tri… ça fait à peu près 2 par département

C’est quoi votre vision de la planète dans 10 ans ? Bien entendu, sous le prisme du tri des déchets. Vers quoi on tend ?

 Compte tenu en fait que la planète est limitée, que les ressources sont limitées… Il faut au moins que la matière soit recyclée au sein de l’Europe… Donc je pense qu’il va falloir développer de la matière à recycler de plus en plus propre. Ce qui veut dire aussi que ça va aller vers de plus en plus de collecte à la source.

On va aller de plus en plus vers du démantèlement, que ce soit au niveau de la construction ou de la déconstruction… Donc pour moi d’ici une dizaine d’années, oui, on va aller vers ce type de modèle.

 Pour l’usager final – je parle du citoyen comme moi – il pourra tout mettre dans la même poubelle ?  

C’est un peu compliqué de se projeter… Un pays comme l’Allemagne par exemple, qui a démarré beaucoup plus rapidement sur des collectes séparées au niveau des citoyens… Je pense que le citoyen allemand et un peu désemparé devant le nombre de poubelles. Je pense que nous il faut en France que l’on tire profit de toutes ces expériences et voir effectivement si il ne faut pas plutôt développer du tri derrière, sachant quand même que bon le tri que le citoyen ne fait pas, si on le fait derrière ça a un coût.

Plus on va trier, plus le citoyen devra payer ? Où est-ce que la revente  de la matière première dégagée des tris suffira financer la filière ?

Entre la collecte et la préparation de la matière, on voit bien qu’on empile un certain nombre de coûts fixes et que c’est coûts c’est difficile de les réduire.  Donc la matière à recycler bien souvent il faut qu’elle soit aidée (subventions).  Par exemple, pour le plastique quand le prix du pétrole est bas,  il est plus difficile de vendre de la matière recyclée par rapport à la matière vierge qui elle, est moins chère.

Donc il est vrai que il faut trouver un juste milieu pour que la matière sortie (traitée, triée) soit disponible à un prix satisfaisant afin qu’elle puisse trouver preneur.  Parce que s’il n’y a pas de clients, il n’y a pas de recyclage…

Le coût du recyclage se répercute dans les impôts locaux c’est ça ?

C’est vrai que pour inciter le citoyens à faire le bon geste de tri, il y a effectivement plusieurs outils qui peuvent remplacer la fameuse « TEOM » (taxe sur l’enlèvement des ordures ménagères), qui est une taxe donc la taxe calculée sur la surface habitable… donc rien à voir avec le comportement du Citoyen. Donc l’idée, c’est plutôt de s’appuyer sur des tarifications incitatives qui incitent les citoyens à recycler.  Donc plus il recycle, moins il paiera de redevance.

Donc, plus le prix du pétrole sera bas, plus le citoyen payera cher ?

 Pour le pétrole, non, il n’y aura pas de lien direct parce que de problème du pétrole c’est qu’il peut être cher et puis tout d’un coup, comme le pétrole répond à des problèmes très géopolitiques, on peut tout à fait avoir des creux très importants donc la restitution ne fera pas directement auprès du citoyen mais elle se fera au niveau de la réincorporation. Donc on voit bien qu’avec le projet de loi sur l’économie circulaire, les histoires de bonus / malus vont pouvoir se répercuter directement sur le produit acheté.

 Donc le coût du recyclage est prélevé à la source… quand on achète le produit ?

 Voilà, quand vous achetez le produit, vous allez effectivement soutenir la réincorporation et le recyclage de la matière.

Assises Nationales des déchets, les 2 et 3 octobre à Nantes.

Assises Nationales des déchets de Nantes – Interview de Thierry Meunier, son président

https://www.frequenceterre.com/2019/09/27/assises-nationales-de-dechets-de-nantes-interview-de-claire-esteve/

 

 

 

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