samedi, novembre 2, 2024

Défendre les droits humains

Changement climatique, montée des nationalismes et de la xénophobie, appropriation du vivant, marchandisation des biens publics, ce début du XXIe siècle concentre tout un tas de menaces pour le bien-être de l’Humanité.
Dans ce contexte, la protection des droits humains s’inscrit comme une nécessité absolue et un moyen de restaurer des solidarités. C’est dans cet esprit que s’est tenu à Paris fin octobre le Sommet des défenseurs des droits humains. 150 militants du monde entier se sont rassemblés, à l’appel notamment d’Amnesty international, et soutenu par de nombreuses ONG, dont France Libertés.
Avec Jérémie Chomette, directeur de France Libertés
Cela fait 20 ans que la Fondation agit en faveur des droits humains. Votre participation à ce sommet allait de soi. Quelle est l’idée majeur portée par ce sommet ?
« C’est de poursuivre la dynamique qui avait été enclenchée 20 ans plus tôt, lors du premier sommet, de la poursuivre et de l’accentuer à une heure où les difficultés sont très fortes pour les défenseurs des droits humains. L’idée est de créer un espace de solidarité et de rencontres entre ces défenseurs pour alerter largement l’opinion publique. »
Il y a 20 ans, les Etats Généraux des Défenseurs des Droits Humains s’étaient achevés sur la Déclaration de Paris et sur un Plan d’action. La Déclaration déplorait la criminalisation des défenseurs, invitait les Etats à “respecter et faire respecter le droit à la liberté d’action des défenseurs des droits humains”. 20 ans après l’urgence reste la même ?
« Malheureusement elle reste la même, voire pire, puisque que le nombre de défenseurs des droits humains incarcérés ou même assassinés ne fait qu’augmenter, que les États malheureusement se radicalisent dans le mauvais sens. Il y a de plus en plus de lois liberticides qui sont prises et il y a plus en plus de latitudes données aux entreprises et aux multinationales ou à d’autres acteurs pour oppresser les défenseurs des droits humains. »
Quels sont les violations de droits dont ces militants font l’objet ?
« Il y a un peu de tout. Cela dépend bien sûr des pays. On pense en ce moment à la Turquie, où il y a énormément de personnes qui sont incarcérés – plus de 150 000 personnes, c’est quasiment une purge. On voit en Russie que les défenseurs des droits des homosexuels et des LGBT sont réprimés et se retrouvent sous les coups, parfois de la part de la police. Et puis dans des pays comme au Brésil, où on a carrément des assassinats. On pense à Marielle Franco, militante des droits LGBT et des droits des minorités, engagée en politique et qui a été assassinée en mars dernier. »
A propos du Brésil, parmi les intervenants, il y avait un représentant Krenak, ce peuple brésilien qui lutte pour ses droits dans la vallée du Rio Doce. C’est un symbole de cette oppression ?
« Oui complètement parce qu’en ce moment on a une vraie montée d’oppression des défenseurs des droits pour l’environnement, tous les gens qui se battent notamment pour empêcher que des terres soit reprises pour faire de l’extraction minière. Et il y a aussi les minorités ou les peuples les plus opprimés, comme les peuples autochtones qui en font partie. Le combat de Giovanni Krenak et tout le peuple Krenak est très symbolique. C’est pour des questions environnementales qu’ils sont opprimés et en même temps pour des questions de minorité, de non reconnaissance des différences, dans la volonté d’imposer un monde uniforme, notamment par les États ou par les entreprises. »
© France LibertésL’élection de Jair Bolsonaro à la tête du Brésil…  fait planer une menace sur les droits des peuples autochtones ?
« Cette élection ne fait qu’empirer les choses. Malheureusement c’est une menace pour toutes les minorités, mais encore plus pour les peuples autochtones puisque le nouveau président a déclaré ouvertement pendant sa campagne que tous les défenseurs des droits humains et les ONG pouvaient être des terroristes. Ensuite il a clairement dit qu’il couperait toute l’Amazonie, qu’il viendrait ravager l’Amazonie pour laisser la place à des activités extractives pour développer des activités lucratives en Amazonie mais aussi ailleurs. Il a clairement ciblé les peuples autochtones qui sont souvent les premiers gardiens de l’environnement. »
Le sommet s’est achevé sur un nouveau plan d’action en soutien des défenseurs des droits humains. Quelles sont les axes de travail ?
« La majeure partie du plan d’action, c’est d’interpeller tous les acteurs pour permettre de créer un environnement sain et un environnement de sécurité pour tous les défenseurs des droits humains. Donc le plan d’action s’adresse aux États bien sûr, mais également aux entreprises, aux institutions financières, aux gouvernements ou les institutions privées qui financent notamment les organisations de protection des droits humains. Et enfin les organisations intergouvernementales et onusiennes pour qu’elles mettent en œuvre la déclaration des Nations Unies qui a été adopté il y a 20 ans et qui a toujours du mal à voir le jour. »
Quel sont les moyens pour faire valoir ces engagements ?
« Le principal moyen, c’est de faire pression largement. Amnesty et toutes les organisations organisatrices de ce sommet, avec les défenseurs des droits d’humains présents, viennent de lancer une grande pétition en espérant recueillir plus d’un million de signatures avant décembre 2018, puisqu’on a une session spéciale des Nations Unies qui va être consacrée aux défenseurs. Donc l’idée est de rappeler aux Nations Unies et à tous les États membres des Nations Unies, leurs engagements pour respecter les défenseurs des droits humains un petit peu partout à travers le monde. C’est vraiment le moyen principal qui est proposé. L’autre moyen c’est de poursuivre ces temps de rencontre entre les défenseurs. Ce sont eux qui les appuient et qui, au quotidien, pourront se battre pour que ces droits soient respectés. »

 

Pour aller plus loin :
Sommet des défenseurs des droits humains
Justice pour le peuple Krenak

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