J’ai beaucoup apprécié que, à l’époque, il y a soixante-cinq ans donc, une certaine mise au point soit déjà faite quant aux relations entre Sartre et Camus : « Comment a-t-on pu embarquer Albert Camus sur la galère de l’existentialisme ? » se demandait Charles Moeller.

Il est vrai que ledit Sartre dont on connaissait l’antipathie, l’acharnement et la jalousie féroces à l’égard de l’auteur de L’Étranger, relevaient peut-être de, je cite Vladimir Jankélévitch (1903-1985), philosophe et résistant : « L’expression de l’image de l’intellectuel engagé qu’il s’échina à transmettre, n’est-ce pas une explication de sa non-résistance entre 1941 et 1944 ? », car, comme il a été historiquement démontré, Sartre collabora à une revue contrôlée et pilotée par la Propagandastaffel, organe allemand lors de l’Occupation, tout comme Simone de Beauvoir, sa compagne et muse, à la radio pétainiste de Vichy[1], alors que Camus, lui, s’était engagé dans la Résistance française. Ceci expliqua peut-être cela.
Alors, c’est avec une joie non dissimulée que l’auteur écrivit : « Camus a récusé formellement son appartenance prétendue à l’école de Sartre » et Charles Moeller de clamer : « Sartre ne parvient jamais à nous convaincre : nous avons l’impression que, quelque part, les dés ont été pipés. Rien de tel chez Camus, son humanité est simple et vraie. »
Il cita encore quelques passages d’ouvrages du Prix Nobel 1957 pour appuyer sa démonstration : « Ces quelques lignes situent la problématique contemporaine devant le problème de la souffrance, elles décri-vent la sensibilité de l’homme moderne, « qui refuse jusqu’à la mort, d’ai-mer cette création (Dieu) où les enfants sont torturés »[2]
Bien sûr, Charles Moeller ne tissa pas que des éloges à Camus, mais quand il décrivit sa philosophie comme celle de « l’amour de l’Homme dans la Lumière » et termina son chapitre par « Comment ne pas aimer un homme qui, au cœur de notre monde de vingt-cinquième heure, de nausée, de « mépris de l’homme », a écrit ces autres lignes : « Il y a dans les hommes plus de choses à admirer que de choses à mépriser », on se dit que la lecture de ce genre d’ouvrage ancien n’est pas obsolète. Que du contraire !
Musique : http://www.michaelmathy.be/#music
[1] Lettres it be, 2017.
[2] Extrait de La Peste.
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