Laurent Joly, historien et directeur de recherche au CNRS, spécialiste de l’histoire de Vichy et de la Shoah a commenté les dessins de Cabu pour l’ouvrage La rafle du Vel d’Hiver – La honte et les larmes, récemment paru aux Editions Taillandier.
Cet ouvrage fait encore, jusqu’au 7 novembre, l’objet d’une exposition au Mémorial de la Shoah à Paris. L’entrée y est gratuite.
Je vous lis ces extraits significatifs qui expliquent l’omerta qui prévalu dans l’ascension politique de François Mitterrand au sommet de l’État français et qui reste pour maintes personnes, une sorte d’icône :
« La rafle du Vel d’Hiv à Paris, soit l’arrestation de près de 13.000 Juifs dont 4.000 enfants, les 16 et 17 juillet 1942, est l’un des épisodes les plus terribles de la collaboration de Vichy sous l’occupation nazie.
(…) Le maréchal Pétain lui-même, que le jeune Mitterrand admirait, en approuva le principe.
Les décideurs côté français furent Pierre Laval (que François Mitterrand respectait comme l’un des rares hommes d’État de la IIIe République) et René Bousquet, qui comptait parmi les amis personnels du futur président socialiste.
La rafle fut exécutée par la police parisienne et ses gardiens de la paix. »
Sous le titre : « La période noire de Mitterrand », il y a quelques années, Le Monde avait publié un véritable brûlot. Jugez-en :
« L’ombre du maréchal Pétain a toujours plané sur François Mitterrand. Malgré les témoignages de son soutien au gouvernement de Vichy et sa décoration de l’ordre de la Francisque au printemps 1943, l' »omerta » sur le passé de l’ancien président de la République a toujours été la règle dans la classe politique française. Pendant des années, il y eut une « vérité officielle », celle du blessé à Verdun, puis du prisonnier envoyé au Stalag (camp pour prisonniers de guerre en Allemagne), d’où il s’évada pour rejoindre Jarnac, sa ville natale de Charente, son entrée dans la Résistance et la rencontre avec le général de Gaulle à Alger en décembre 1943.
Mais, après le stalag et avant les maquis, un grand trou noir. Un non-dit jalousement gardé, un silence lourd, une mémoire occultée, un grand flou entretenu par Mitterrand lui-même malgré ses fréquentations affichées après-guerre avec René Bousquet. »
Serge Moati qui tira un documentaire de cette affaire, déclara aussi au Monde : « Comment expliquer ce silence ? C’est une énigme ». Un Serge Moati, qui ajouta que l’ancien président de la République n’avait jamais été antisémite.
Quant au général de Gaulle, des archives signifient qu’il aurait dit à Mitterrand : « Votre sympathie pour Vichy sera mise sur le compte d’une erreur de jeunesse ».
Voici, donc, une occasion de se rendre au Mémorial de la Shoah pour en savoir davantage sur cette odieuse et dramatique rafle parisienne, ou de lire le livre de Cabu.
Sources : Magazine Union Pacifiste de France, octobre 2022 et Le Monde, 22 avril 2008.
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