jeudi, mars 28, 2024

« La Nuit de l’usine » ou la revanche des perdants d’Eduardo Sacheri (Éd. Héloïse d’Ormesson)

Littérature sans Frontières est une chronique de Pierre Guelff.

 Avec « La Nuit de l’usine » d’Eduardo Sacheri paru aux Éditions Héloïse d’Ormesson, voici un roman touchant, révoltant, poignant, parfois sur fond de misère sociale ou, contraste saisissant, d’opulence et d’affairisme, le tout souvent teinté d’un humour décapant. Ce livre de près de 440 pages m’a beaucoup plu, car on y est littéralement scotché de la première à la dernière page. Pas une page ne lasse le lecteur, car l’histoire contée se déroule à un rythme soutenu.

Pourtant, le décor et les principaux personnages, la « bande des sept tocards », comme précise l’auteur, sont, pour la plupart, sans grande particularité et se fondent comme le commun des mortels dans le quotidien de la petite cité argentine d’O’Connor, abandonnée et oubliée des autorités depuis la fermeture définitive d’une usine. Seuls les pauvres et les ratés restent sur place : « Trop bêtes ou trop fainéants », disent les femmes. Ceux qui ont réussi, surtout les jeunes qui ont fui ce village éteint et triste, habitent la capitale, ou La Plata, ou Rosario. Ils sont devenus médecins, avocats, comptables et ne reviennent plus à O’Connor.

Mais, brusquement, à cause d’un banquier véreux et d’un nanti sans scrupule qui, tous deux, sont de mèche pour les spolier de leurs économies qu’ils grappillèrent ci et là pour relancer une exploitation agro-alimentaire, ces tocards du village, mus par le désespoir, se mobilisent. Et de quelle manière !

« Être un salaud et se croire quelqu’un de bien. Comme ça, tu fais ce que tu veux. Tu baises tout le monde et tu dors du sommeil du juste ! » dit l’un de la bande à un comparse en parlant de Manzi, le nanti complice du banquier véreux. Alors, une machination explosive se met en branle de manière minutieuse par le groupe. Elle sait  que Manzi a placé le produit des  détournements empilé en liasses de dollars et de pesos dans une cache sous terre, en pleine nature et les sept volés mettent au point un programme pour récupérer leur argent, malgré les alarmes, contrôles, failles dans leur préparation…

Durant 440 pages, on suit, pas à pas, la mise en place de récupération de leurs avoirs par ce commando hors norme, avec sa naïveté, ses maladresses, mais, aussi, la lente montée d’angoisse de Manzi.

Mot d’ordre du groupe : « Si on ne fait rien, on se fera davantage bouffer. Si on fait quelque chose et ça tournera mal, ils nous boufferont aussi. Donc… »

Donc, il faut garder le secret de l’attaque de la chambre forte creusée au milieu de nulle part, mais placée sous haute surveillance et, inutile de préciser que la tâche n’est pas aisée…

En d’autres termes, un fantastique ouvrage d’un combat prolétarien contre des nantis malhonnêtes !

 

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.