« Littérature sans Frontières » est une chronique de Pierre Guelff.
Quelle extraordinaire histoire que celle racontée avec maîtrise par Gilbert Bordes dans son roman La Belle Main paru aux Presses de la Cité.
Solène est une jeune étudiante en Droit qui vit à Paris avec sa mère, Josette, chef de rayon à La Samaritaine ; une femme renfermée sur elle-même, couvant son enfant au point de lui interdire d’aller garder les enfants du couple du docteur Breugère, handicapé de la Seconde Guerre mondiale, qui s’est terminée une vingtaine d’années plus tôt, et de son épouse Annette, en leur château de Sologne.
Quelle en est la raison profonde ? La jeune fille a beau questionner sa mère sur son passé, l’identité de son père, la raison de son mutisme : « Jamais je ne te parlerai de ça ! ». Solène, pour la première fois, désobéit aux ordres et se rend à son job de nurse afin de se faire un peu d’argent de poche et respirer l’air pur de la campagne.
Elle y rencontre Paul, luthier, ami du docteur, compagnon de la Résistance mais enclin à abuser de l’alcool. Il devient cependant son amant.
« Pour l’étudiante en droit, n’est-ce pas une déchéance de tomber amoureuse d’un homme de vingt ans son aîné et ivrogne ? » questionne l’auteur.
Lors d’une rencontre tumultueuse avec sa mère, Solène lui dit :
- Je voudrais comprendre et je pense qu’il faut maintenant tourner la page, que la haine ne peut conduire à la destruction !
– Peut-être, mais la haine, c’est tout ce qui reste quand on t’as pris ton âme !
Ici, l’histoire de ce récit marque les esprits et les cent dernières pages de ce roman exceptionnel d’intensité, révèlent la vérité qui, au-delà du roman, fut trop souvent le cas de Françaises à la Libération.
Mais, trop longtemps, comme le souligne Gilbert Bordes, « les yeux ne montrent que ce que l’on a envie de voir et les prétentieux sont tellement sûrs d’eux, qu’ils ne voient pas leurs fautes. »
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